Une nouvelle arme dans la lutte contre l'arthrose?

Traiter l'arthrose avec les algues

22 août 2017 | MARC ESTERMANN
Les chercheurs de l'ETH Zurich (École polytechnique fédérale de Zurich), de l'Empa et de l'institut de recherche norvégien SINTEF sont sur la bonne voie en ce qui concerne une nouvelle approche dans le traitement de l'arthrose. Cette approche est basée sur un polysaccharide, une molécule de sucre à longue chaîne issue d'algues brunes. Cet «alginate» chimiquement modifié réduit le stress oxydatif, réduit l'inflammation dans les essais de culture cellulaire et contient la réponse immunitaire vis-à-vis des cellules cartilagineuses, et combat ainsi les causes de l'arthrose. La recherche n'en est pourtant encore qu'à ses débuts.
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La nouvelle approche dans le traitement de l'arthrose est basée sur d'algues brunes. Image: istockphoto

L'arthrose est la maladie articulaire la plus fréquente ; environ 90 pour cent des 65 ans sont touchés, à des degrés divers. Mais cette maladie dégénérative est également très répandue chez les jeunes personnes. En cas d'arthrose, le cartilage de l'articulation, sorte de couche protectrice sur les os qui «lubrifie» les articulations, se dégrade au fil du temps. Cela peut avoir des conséquences extrêmement douloureuses pour les personnes concernées, en raison de l'inflammation liée à la dégradation du cartilage. À un stade avancé de la maladie, les os ne sont plus convenablement protégés et risque de frotter directement les uns contre les autres.

L'arthrose est susceptible de toucher toutes les articulations du corps, mais le plus souvent il s'agit des articulations du genou, de la hanche et des doigts. La maladie est incurable à ce jour. Dans un premier temps, les traitements courants tels que les anti-inflammatoires et les analgésiques permettent de combattre les symptômes. En dernier recours, il arrive souvent que seule une opération consistant à remplacer artificiellement l'articulation puisse aider.

Les premiers résultats de recherche suscite de l'espoir

Lors de tests en laboratoire, l'équipe de la chercheuse de l'ETH Zurich, Marcy Zenobi-Wong, et la chercheuse de l'Empa, Katharina Maniura, ont été en mesure d'identifier, en même temps que le SINTEF en Norvège, une substance qui a le potentiel de mettre un terme à la dégradation du cartilage dans les articulations. Cette dernière est choisie parmi les tiges d'algues brunes – plus spécifiquement de laminaires (lat. Laminaria hyperborea) – l'alginate est un dérivé de polysaccharide similaire à certaines biomolécules extracellulaires du cartilage. Les chercheurs ont modifié chimiquement les alginates à l'aide des groupes composés de sulfates, puis les ont ajoutés sous forme diluée à des cultures de cellules afin d'étudier la réaction de différents types de cellules à la polysaccharide modifiée. Il a été constaté que le sulfate d'alginate peut considérablement réduire le stress oxydatif, une cause fréquente de lésions cellulaires ou même de la mort des cellules, et que plus il y a de groupes composés de sulfates attachés à la molécule d'alginate, mieux c'est.

En outre, l'alginate a été capable, encore une fois en fonction du nombre de groupes composés de sulfates, de supprimer la réaction inflammatoire : aussi bien dans les cellules de cartilage humain, appelées chondrocytes, que dans les macrophages - les «phagocytes» de notre système immunitaire - le sulfate d'alginate pourrait réguler à la baisse l'expression des gènes, laquelle déclenche une réponse inflammatoire. Les molécules d'algues devraient donc ralentir la dégradation du cartilage articulaire. «Nous avons espoir que ces molécules puissent même stopper la dégradation», explique Markus Rottmar, chercheur à l'Empa.

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Tests de cellules dans le laboratoire de l’Empa. Image: Empa
D'autres recherches sont nécessaires
Le sulfate d'alginate n'a jusqu'à présent été étudié qu'in vitro, en laboratoire, sur des cultures cellulaires. Bien que les résultats soient encourageants, la recherche doit continuer. Les substances doivent ensuite être testées sur les animaux. Si les résultats s'avèrent également prometteurs, des essais cliniques seront ensuite effectués sur des personnes. Ces tests sont cependant longs et coûteux. Si tout fonctionnait correctement, il faudrait toutefois attendre encore quelques années avant que les patientes et patients atteints d'arthrose ne puissent être traités par le sulfate d'alginate.

Rédaction / Contact médias

Référence bibliographique

Anti-oxidant and immune-modulatory properties of sulphated alginate derivatives on human chondrocytes and macrophages; A Kerschenmeyer, Ø Arlov, V Malheiro, M Steinwachs, M Rottmar, K Maniura-Weber, G Palazzolo, M Zenobi-Wong; DOI: 10.1039/c7bm00341b

Frontispice Biomaterials Science