Cellules pulmonaires humaines après une exposition de trois jours à des nanoparticules doxyde de fer (Fe2O3). Ici aussi les cellules commencent déjà à sarrondir et à se détacher de leur support, un premier indice comme quoi ces particules doxyde de fer sont elles aussi cytotoxiques. Lavènement de lère nano ouvre des possibilités jusquici insoupçonnables à la science des matériaux. En effet, les nanoparticules dont le diamètre natteint que quelques nanomètres et la taille ne dépasse souvent pas celle de quelques molécules présentent dautres propriétés physico-chimiques que les particules plus grosses du même matériau. Ceci permet de produire des matériaux avec des caractéristiques «sur mesure». Des chemises dont le tissu repousse les salissures, des poêles qui nattachent plus, des revêtements résistant aux griffures, des disques durs dordinateur plus performants ou encore des crèmes solaires plus efficaces la gamme des produits nano est impressionnante. Mais comment réagit lorganisme humain à ces nanoparticules? Quelle action exercent-elles sur les cellules et les tissus? Comme les nanoparticules ont une taille à peu près semblable à celles des molécules de protéine dune cellule, celles-ci les absorbent facilement. Mais que se passe-t-il alors dans les cellules? De nombreuses questions et peu de réponses. Il est donc grand temps de se préoccuper de la nanotoxicologie, ont pensé Peter Wick, Arie Bruinink et leurs collègues à lEmpa avec les chercheurs de lEPF de Zurich réunis autour de Wendelin Stark. «Si lon désire utiliser ces nouveaux matériaux à grande échelle, il est nécessaire délucider si leurs propriétés physico-chimiques elles aussi nouvelles nont pas des effets inattendus sur lorganisme humain» déclare le biologiste cellulaire Wick. Des cultures de cellules pour des tests de toxicité sans cobayes Le but des scientifiques de lEmpa était de développer des tests rapides et simples pour obtenir une première estimation de la toxicité des nanoparticules sans devoir recourir à des essais sur lanimal. Les cultures cellulaires, que lon utilise aussi par les tests de toxicité des produits chimiques, étaient un candidat idéal. «Nous avons toutefois dû constater que cela nétait pas aussi simple avec les nanoparticules» remarque Wick. Ces minuscules particules sagglomèrent très rapidement entre elles. «Lorsque nous ajoutions les nanoparticules à la solution nutritive, nous nobtenions au début que des grumeaux à peu près aussi gros quune cellule entière» se souvient Wick. «Dieu merci nous avons de bon spécialistes en science des matériaux à lEmpa» Ils sont venus au secours des biologistes avec quelques astuces pour mettre en suspension la nanopoudre dans la solution nutritive et pour ensuite procéder à son examen de contrôle dans le microscope électronique. Ainsi les scientifiques de lEmpa savent toujours très exactement quelle forme et quelle taille ont les nanoparticules. Entre temps ils sont encore parvenus à trier les nanoparticules selon leur forme et leur taille. «De nombreuses études de toxicité effectuées jusquici ont été réalisées par des biologistes qui ne savaient pas exactement tout comme nous au début sous quelle forme finalement les nanoparticules interagissaient avec les cellules. Cest là de la bonne biologie mais de la science des matériaux misérable» déclare Wick. Si lon ajoute simplement du matériau nano brut à la culture, on ne sait jamais avec certitude quel type de particule est responsable de leffet observé. Toutes les nanoparticules ne présentent pas la même toxicité pour les cellules Après avoir rempli leurs devoirs décole en science des matériaux, Wick et ses collègues ont examiné sept nanoparticule industriellement importantes que leur avaient fournies lerus collègues de lEPFZ quant à leurs effet cytotoxicologiques du dioxyde de silicium inoffensif utilisé depuis longtemps déjà comme adjuvant alimentaire, p. ex. dans le Ketchup, en passant par les oxydes de titane et de zinc que lon trouve dans les cosmétiques et jusquaux oxydes de cérium et de zirconium utilisés dans lindustrie électronique. Comme référence, les chercheurs de lEmpa ont testé les fibres damiante dont les effets toxiques sur les cellules sont très bien connus (les fibres damiante, qui présentent une longueur moyenne denviron 10 micromètres et un diamètre denviron 1 micromètre, ne font toutefois pas partie des nanoparticules). Comme cellules-cobayes, les chercheuses et les chercheurs ont utilisé deux types de cellules; des cellules pulmonaires humaines et des fibroblastes de souris qui sont fréquemment utilisées pour les tests de toxicité. Le métabolisme des cellules, leur taux de division cellulaire ainsi que laspect des cellules sous le microscope ont été utilisés comme indicateurs de létat de santé des cellules. La conclusion de cette étude qui sera publiée prochainement dans la revue scientifique «Environmental Science & Technology»: «Toutes les nanoparticules ne présentent pas la même toxicité». Entre lamiante et le dioxyde de silicium, lEmpa a établi une sorte de classement toxicologique. Alors que les particules de fer et de zinc sont fortement agressives vis-à-vis des cellules pulmonaires humaines, le phosphate tricalcique (qui sutilise sur les implants médicaux) sest révélé aussi bien toléré que le dioxyde de silicium. Les oxydes de titane, de cérium et de zirconium ont quant à eux perturbé temporairement le métabolisme cellulaire mais présentaient toutefois une toxicité nettement inférieure à celle de lamiante. Dune manière générale, les cellules pulmonaires humaines réagissent nettement plus sensiblement aux nanoparticules que les fibroblastes de souris. «Les cellules pulmonaires sont donc particulièrement bien adaptées pour ce genre détudes de toxicité», déclare Wick. «Notre but est de développer un système de cellules qui se rapproche le plus possible des essais sur les animaux.» Cest aussi pourquoi les chercheurs de lEmpa étudient actuellement toute une série de lignées cellulaires, parmi lesquelles trois types différents de cellules pulmonaires ainsi que des cellules nerveuses fraîches dembryon de poulet. Les nanotubes de carbone: plus ils sagglomèrent entre eux plus ils sont toxiques Dans une étude non encore publiée, Wick et ses collègues ont passé sous la loupe - au sens littéral du terme les nanotubes de carbone. Au contraire des nanoparticules, les nanotubes sont dautant plus toxiques pour les cellules quils sont agglomérés en aiguilles. «Ces agglomérats ressemblent aux fibres damiante tant par leur aspect que par leur toxicité» déclare Wick. «Il semble quils ne soient ainsi pas tout à fait inoffensifs.» Le prochain objectif du biologiste quest Wick est de comprendre ce qui se passe exactement dans une cellule lorsquelle est exposée à des nanoparticules. Pour cela il analyse lactivité de milliers de gènes à laide de ce que lon appelle des puces à ADN. «Nous pouvons ainsi déceler ce que les particules provoquent dans les cellules et voir quel programme génétique elles enclenchent ou déclenchent» relève Wick. «NanoRisk» étudie aussi les effets de la nanotechnologie sur la société Les résultats des études réalisées par Wick seront utilisées avec dautres données provenant par exemple de tests sur des animaux ou détude sur la diffusion des nanoparticules dans lenvironnement par les chercheurs réunis autour de Lorenz Hilty pour procéder à une estimation des risques découlant des nanoparticules et des nanotubes. Pour cela ils analysent toutes les études effectuées sur la nanotoxicologie et interviewent des experts pour évaluer les forces et les faiblesses de ces études. Le résultat provisoire: il nexiste actuellement que peu détudes fiables dans ce domaine et qui de plus sont parfois contradictoires. Ces contradictions pourraient être dues entre autres à ce que les nanoparticules utilisées ne sont souvent pas analysées avec suffisamment de précision, de sorte que les chercheurs ne savent souvent pas quelle forme et quelle taille présentent les particules quils utilisent. Dans une deuxième phase, les chercheuses et chercheurs de lEmpa étudieront de plus près des exemples dapplication concrets des nanoparticules, et cela depuis la production des nanoparticules en passant par la fabrication des produits qui les renferment et jusquà leur élimination. Le but de cette analyse de cycle de vie est de réunir des informations précises sur les quantités de nanoparticules libérées et sur les phases où se produit cette libération pour pouvoir en déduire des stratégies de prévention possibles. Pour plus dinformations Dr Peter Wick, Empa, Lab. Materials Biology Interactions, , tél. +41 71 274 76 84 Claudia Som, Empa, Lab. Technologie et société, , tél. +41 71 274 78 43 Prof. Dr Wendelin Stark, EPF, Institut für Chemie und Biowissenschaften, , tél. +41 44 632 09 80 Dr Michael Hagmann, Empa, Section Communication, , tél. +41 44 823 45 92 |